Eléonore Duplay ( 1768-1832)

Eléonore Duplay l'amie de Robespierre

Introduction

Eléonore tout comme sa sœur Elisabeth, est une égérie de la Révolution française, célèbre non pour son rôle tenu pendant la Révolution française, mais par sa proximité avec Maximilien Robespierre, hébergé par son père le menuisier Maurice Duplay, trois années durant. On a beaucoup spéculé sur une relation amoureuse qui se serait installé entre Eléonore et Maximilien Robespierre, cette spéculation a commencé dès Thermidor, et c’est perpétué tout le XIXème siècle, et continue de nos jours dans les forums internet. Certes Eléonore a peut être encouragé cette rumeur en vivant recluse, telle une veuve, chez son père puis chez son frère Jacques le restant de sa vie, voici ce qu’écrit son neveu Philippe Le Bas (1794-1860), dans son Dictionnaire Historique :

Eléonore Duplay selon Philippe Le Bas.

 

La fille aînée de Duplay, Éléonore, partageait les sentiments patriotiques de son père. C’était un de ces esprits sérieux et justes, un de ces caractères fermes et droits, un de ces cœurs généreux et dévoués, dont il faut aller chercher le modèle dans les beaux temps des républiques anciennes. Maximilien ne pouvait manquer de rendre hommage à de telles vertus ; une mutuelle estime rapprocha leurs deux cœurs ; ils s’aimèrent sans jamais se l’être dit, il n’est nul doute que s’il eût réussi à ramener l’ordre et le calme dans l’État, et que son existence eût cessé d’être aussi agitée, nul doute qu’il ne fût devenu le gendre de son ami. La calomnie, qui n’a ménagé aucun de ceux qu’affectionna la victime des thermidoriens, n’a pas manqué de s’attaquer à la femme dont il voulait faire son épouse, et l’on n’a pas craint d’écrire qu’un lien coupable les unissait. Nous, qui avons connu Éléonore Duplay pendant près de cinquante ans, nous qui savons jusqu’à quel point elle portait le sentiment du devoir, jusqu’à quel point elle s’élevait au-dessus des faiblesses et de la fragilité de son sexe, nous protestons hautement contre une aussi odieuse imputation. Notre témoignage mérite toute confiance[1]

 

[1] Dictionnaire de Le Bas, op. cit., v 6, p. 821.

 

Eléonore Duplay selon Lamartine

Lamartine, quant à lui, écrit dans Les Girondins :

Âme virile, disait Robespierre de son amie, elle saurait mourir comme elle sait aimer. Le dénuement de sa fortune et l’incertitude du lendemain l’empêchait de s’unir à elle avant que la destinée de la France soit éclaircie ; mais il n’aspirait, disait-il, qu’au moment où, la Révolution terminée et affermie, il pourrait se retirer de la mêlée, épouser celle qu’il aimait et aller vivre en Artois, dans une des fermes qu’il conservait des biens de sa famille, pour y confondre son amour obscur dans la félicité commune[1].

 

[1] Autour de Robespierre…, p. 78. Stéfane-Pol présente ce texte comme un extrait de la partie de l’Histoire des Girondins revue par Philippe Le Bas.

 

Eléonore Duplay finalement mal connue

 

Contrairement à sa soeur Elisabeth,  nous ne savons que peu de choses de la vie d’Eléonore Duplay après Thermidor, nous n’avons que quelques informations glanées sur des actes notariés, comme l’inventaire après décès de Maurice Duplay en 1820. On apprend dans cet acte qu’Eléonore tout comme Jacques (et sa famille), vivaient ensemble avec leur père dans une maison de l’Ile de la Cité, au 29 rue de Harlay. Eléonore est désigné dans cet acte comme « gardienne des scellées ». Dans l’inventaire réalisé des biens de son père sont listé de nombreux tableaux, il s’agit essentiellement de copies, et d’aquarelles, sont-elles l’œuvre d’Eléonore ? nous savons qu’Eléonore avant thermidor fréquentait l’atelier du peintre Regnault, l’une de ses camarades en cet atelier Albertine Clément-Emery, a écrit ses souvenirs, dans son récit elle nomme Eléonore Eugénie, et nous en livre un joli portrait :

Peindre Eugénie… impossible, sans être jolie, sa figure était agréable, ses yeux bleus s’harmonisaient si bien avec ses cheveux blonds, il y avait tant de bienveillance dans son rare sourire, tant de mélancolie sur son front ouvert, tant de fierté dans son regard d’aigle, tant de sentiment dans ses expressions habituelles, et de franche rudesse dans ses improvisations, qu’il fallait l’aimer ou la haïr. Je l’aimais beaucoup sans pouvoir définir le sentiment qu’elle m’inspirait, sa bonté m’attirait, sa gravité m’en imposait, ses sages conseils m’électrisaient[1].

Éléonore fut considérée comme un mythe vivant, une icône inaccessible des républicains du début du XIXe siècle. Une correspondance existe en ce sens entre Charles Teste[2] et Buonarroti[3]. Ainsi, il semblerait que Buonarroti ait cherché à recontacter, sans succès, Éléonore avant 1830. A. Demougeot évoque cette correspondance dans laquelle Buonarroti écrit à Teste qu’Eléonore refuse tout entretien, mais que « le serrurier Didier, autrefois très lié avec la famille Duplay, pourrait renseigner[4] ». Effectivement, ce Didier était un très proche de la famille, comme le prouve l’acte de tutelle du jeune Philippe dans lequel il est cité.

 

[1] Ibid., p. 14.

[2] Charles Teste, né le 27 mai 1783 à Bagnols-sur-Cèze (Gard) ; libraire, éditeur, homme de lettres ; ami de Filippo Buonarroti et de Marc-René de Voyer d’Argenson, républicain infatigable puis néo-babouviste, il joua un rôle considérable dans le développement du néo-babouvisme dans les milieux républicains.

https://maitron.fr/spip.php?article38145, notice Teste Charles, Antoine, par Jean Maitron, Michel Cordillot, Jean Risacher, version mise en ligne le 20 février 2009, dernière modification le 20 juin 2018.

[3] Armando Saitta, Filippo Buonarroti. Contributi alla storia della sua vita e del suo pensiero, Edizioni di Storia e letteratura, Rome, 1950-1951, t 1, p. 90-94.

[4] A. Demougeot, Un égalitaire : Filippo Buonarroti, deuxième partie 1803-1837, Les recherches régionales, Nice, Centre de documentation des Archives des Alpes Maritimes, 1972, n°2, p. 12.

 

La sépulture d’Eléonore Duplay

Finalement ce qui reste le plus connu sur Elisabeth Duplay c’est sa sépulture  : la concession 61P1 1818 de la 34ème division du Père-Lachaise, où elle est inhumée. Le souvenir de Maximilien Robespierre, est évoqué indirectement sur une plaque déposée par l’AMRID en juillet 2003 « A Eléonore Duplay amie de Maximilien Robespierre », cette plaque complète une stèle reconstituée à l’identique dans le cadre de la restauration de la sépulture, entreprise par la ville de Paris en 1985, au titre des sépultures présentant un intérêt artistique et/ou historique. La fiche de cette sépulture de la commission d’architecture funéraire, intitulée « Concession : Duplay Éléonore (1768-1832) no61P1818 », indique au sujet de l’intérêt historique et architectural : « La tradition orale considère qu’il s’agit de la « fiancée de Robespierre qui, jusqu’à l’âge de 64 ans, porta le deuil de Robespierre ».

Ainsi, à défaut d’avoir obtenu une rue à son nom à Paris, Maximilien Robespierre aura-t-il pu inspirer à cette ville, le fait de conserver à ses hôtes leur sépulture, et à travers cette dernière pouvoir lui-même apparaitre, et demeuré virtuellement aux côtés de ses hôtes pour l’éternité.

Toutefois comme nous le verrons prochainement dans un article spécifique, cette sépulture abrite au moins onze personnes que nous avons pu identifier, et qu’il convient de ne pas occulter. Parmis lequels Maurice Duplay l’hôte et ami de Robespierre.

 

 

Tombe de la famille Duplay  en 2029

Sépulture Duplay en 2020

Ci dessous plaque de l’AMRID, et à droite stèle refaite à l’identique en 1985.

Plaque AMRID Tombe Duplay

Sépulture Duplay en 1935

Carte postale 1935 Tombe Duplay
Inscription stèle tombre Duplay